Connerie. Fouttu connerie que d'avoir prit la voiture en ce jour. Neige ne cesse de tomber, pureté du paysage, silence rompu par cyrillique. Il jure, crache sa haine. Russe filtre d'entre ses lèvres, canne s'abat contre un pneu. Dérapage, bagnole quitte la route, finit dans le décors. Fin de la course. Éclopé n'a rien, l'horreur de ces engins lui vrille le cortex, bile au bord des lèvres. Relent d'un passé qu'il ne peut oublier, guibole douloureuse, rappel à l'ordre de ce jour. Solidité du macadam, avoir manqué de rester sur le carreau. Pogne ganté de cuir vient à saisir appareil téléphonique, absence de réseau. «Génial, tout simplement génial.» Paroles amères, acerbes, rage gronde. Combiné retrouve le fond de sa poche, pas le choix, il va devoir marcher. Sac sur une épaule, canne foule le sol couvert de blanc. Démarche peu assuré, balade devenue cauchemars pour l'estropié. Arpions glissent sur la poudreuse, chute jamais loin, le guette, ricane. Il galère, Priam, ayant du mal à déambuler d'ordinaire, la neige ne fait que le déranger, l'épuiser. Pas âmes qui vivent dans le coin, personne pour l'aider. Pincement de lèvres à l'idée de claquer sur le bord de la chaussée. Temps file, minutes s'égrènent, patte folle devient de plus en plus douloureuse. Grognement meurt contre l'émaille de ses dents. Pogne récupère tube orangé, cachetons qu'il avale d'une traite. Douce addiction qu'il se refuse d'assumer, d'accepter, toxicomane double les doses, s'enivre de calmant pour taire les maux. Soupire s'épanche des lippes, marche qu'il reprend jusqu'à l'entente d'un moteur grondant. Faciès pivote, avise le véhicule en approche. Appui qu'il prend sur sa canne, stabilité précaire, bras se lève en guise de signe. «Arrête toi, pitié arrête toi..» Supplique basse, voiture le passe. Colère qu'il sent monter jusqu'à remarquer l'arrêt de celle-ci à quelques mètres. Haussement de sourcil, ajustement du sac sur son épaule et il la rejoint. Arrivée à hauteur, vitre s'abaisse, laisse passer l'odeur de tabac, chaleur du chauffage. Frémissement. «Bonjour, vous pourriez me ramener en ville, s'il vous plaît ? J'ai emboutis ma voiture et mon téléphone capte que dalle.» Vague coup d'œil qu'il glisse à son interlocuteur, air renfrogné lui faisant baisser les iris. «Sinon laissez, j'vais me débrouiller.» Canne claque le bitume sous la neige, regard qu'il porte vers la ville. Putain de connerie.
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Aoibhean Jagerhart
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Sujet: Re: Les indésirables │ Aoibhean {my bear man ♥} Dim 21 Fév - 13:46
❝ les indésirables ❞
La cigarette s’éteint en touchant le sol humide devant lui, mais par acquis de conscience, il préfère l’écraser. Ne sait-on jamais ce qu’il pourrait de toute évidence, arriver, si elle venait à reprendre feu. M’enfin, le temps est si hivernal, qu’en vérité, il ne se passera rien. Il s’est préparé ce matin avec un dédain certain. En se regardant dans le miroir, il a su que sa journée serait différente. En quoi ? Il n’en sait trop rien. Juste qu’elle le serait, par bien des égards. Sans doute que pour une fois, il n’y aurait pas de cadavres à embaumer aujourd’hui, ce qui lui donnerait le temps de nettoyer les locaux. Chose qu’il prend toujours le temps de faire mais, pour une fois, il veut être minutieux. Ou alors, un coup du destin, qu’importe. Mais quelque chose. Son instinct le trompe rarement à Aoibhean. Il le guide toujours là où il faut. Parfois, ça lui manque d’ailleurs son travail. De pister, de fouiner, d’essayer. Il y a là, un besoin cruel de combler le vide qu’est sa vie. L’avantage avec les morts, c’est qu’ils ne parlent pas. Cela dit, ça reste quand même un certain problème, non négligeable. Mais c’est bien dans ses silences que l’Homme demeure le plus intéressant.
Il dévisage la route. Son esprit divague un peu trop. Il réfléchit Aoibhean, il réfléchit trop. Il cherche des réponses existentielles à des questions rationnelles ; autrement dit, qui n’en ont pas. Fâcheuse habitude. Mauvais réflexe d’une vie à ne jamais se confier, à ne jamais s’attacher. Certains diraient que c’est de la peur. D’autres qu’il n’y a là qu’une hantise de la solitude. Sans comprendre qu’en fin de compte, il s’y est fait. À ce vide, à ce manque de l’autre. Il n’a jamais vraiment ressenti Aoibhean, c’est même là son plus grand problème.
Pourtant, son regard se fixe sur un point au loin. Quelqu’un dont la voiture a dû tomber en panne… au début, il lui passe devant. Il n’a aucune envie de s’arrêter. Pourquoi faire d’ailleurs ? Il ne le connait pas, il ne lui doit rien. Mais bien vite, il fait marche arrière, en le regrettant déjà. Il baisse sa vitre et l’écoute. Enfin, il se focalise sur l’infini détails que ce dernier lui offre. Le mensonge dans le fond des pupilles. Mh, ça n’annonce rien de bon et il plisse les yeux. Soit, ce n’est pas son affaire de toute façon. Et la canne. Il s’attarde sur la canne. Pourquoi il s’y attarde. Il ne sait pas trop. Mais un homme de son âge ne devrait pas avoir de canne. Il arque un sourcil Aoibhean. Mais il reste méfiant. Il a pitié, après tout, il fait froid aussi. Beaucoup froid. « Montez. Je vais en ville. Vous trouverez sans doute votre garagiste. » Sa veste rejoint les sièges arrière et son pouce tapote sur le volant, un peu avec impatience. Il entend le cliquetis de la canne sur le verglas et le sol et secoue la tête en le voyant faire dans le rétroviseur. « Mettez la ceinture. Je suis pressé. » Mais il ment, sans même le regarder.
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